Le corridor Chennai-Vladivostok : une nouvelle voie commerciale qui révolutionne le partenariat Inde-Russie

Le corridor Chennai-Vladivostok : une nouvelle voie commerciale qui révolutionne le partenariat Inde-Russie© RIA NOVOSTI
Le port russe de Vladivostok (image d'illustration).
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La crise de la mer Rouge a attiré l’attention sur le corridor maritime oriental Chennai – Vladivostok entre la Russie et l’Inde, une route commerciale envisagée et destinée à transporter du coke, du pétrole brut, du GNL, des engrais ainsi que des conteneurs.

La courbe de demande ascendante de pétrole en Inde reflète les contours du paysage énergétique mondial qui est en train de changer. Selon l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), l’Inde aurait besoin de 5,59 millions de barils par jour en 2024, une augmentation marginale par rapport aux 5,37 millions de barils par jour en 2023.

Les importations de pétrole en Inde sont montées à des niveaux sans précédent en janvier 2024 pour atteindre 5,33 millions de bbl/j, différence significative par rapport aux 4,65 millions de bbl/j livrés en décembre 2023.

Le rôle de la Russie dans les importations de pétrole en Inde reste important. Assurant plus de 35 % des importations totales de pétrole brut en 2023, soit 1,7 million de bbl/j, selon S&P Global, elle a conservé sa position de premier fournisseur de l’Inde, malgré une baisse notable de ses exportations vers le pays pour le deuxième mois consécutif en janvier 2024 sur fond des sanctions. Selon le London Stock Exchange Groupe, les importations indiennes en provenance de Russie auraient diminué de 4,2 % pour atteindre 1,3 millions de bbl/j, tandis que les données de Vortexa témoignent d’une dégringolade plus importante de 9 % qui donne 1,2 millions de bbl/j. La baisse a particulièrement affecté l’offre de pétrole doux et léger Sokol.

L’intérêt accru pour le brut russe démontré par les raffineurs indiens malgré le durcissement des sanctions est complété par la hausse des prix du fret maritime causé par les attaques des Houthis dans la région de la mer Rouge. La crise a perturbé le transport maritime mondial et les chaînes d’approvisionnement, ce qui a eu un impact sur les prix des produits de base et ceux du pétrole brut. Le canal de Suez est l’une des routes les plus importantes pour le transport maritime international. D’après les données de Kpler, de 10 à 12 % des exportations mondiales de pétrole brut et de 14 à 15 % des exportations de produits pétroliers, dont l’essence et le diesel, transitent par la mer Rouge. En outre, la CNUCED signale que les transporteurs de gaz naturel liquéfié ont été les plus touchés par la situation jusqu’à cesser entièrement leurs activités depuis le 16 janvier 2024.

L'Inde subit la crise en mer Rouge

Ceci met en évidence le besoin de mécanismes commerciaux résilients pour surmonter toute crise imprévue et façonner l’avenir des relations commerciales. L’Inde, qui dépend fortement du canal de Suez pour ses échanges avec l’Europe, l’Asie occidentale et l’Afrique, fait face à d’importantes répercussions de la crise de la mer Rouge, environ 60 % de ses importations de pétrole brut provenant du Moyen-Orient.

Cette crise a non seulement renforcé les préoccupations de l’Inde en matière d’énergie et de sécurité, mais elle a également fait grimper les coûts et les délais de transport. On estime que la fermeture du canal de Suez pourrait entraîner des pertes d’environ 200 millions de dollars par jour pour le commerce indien.

Les frais de transport ont doublé

En outre, le conflit a fait grimper les frais de transport de 40, voire de 60 %, ce qui a entraîné une hausse considérable des tarifs pour le transport de conteneurs 20 pieds vers l’Europe et les États-Unis, 2 000 dollars aujourd’hui en moyenne contre 500 dollars avant la crise. De même, les taux de fret pour l’expédition de conteneurs vers l’Arabie Saoudite ont doublé, passant de 700 à 1 500 dollars.

La crise de la mer Rouge a donc attiré l’attention sur le corridor maritime oriental entre la Russie et l’Inde, une route commerciale en conception, destinée à transporter du coke, du pétrole brut, du GNL, des engrais ainsi que des conteneurs, reliant les ports de Chennai et Vladivostok en passant par le golfe du Bengale, la mer d’Andaman, le détroit de Malacca, la mer de Chine méridionale, la mer de Chine orientale et la mer du Japon. Cette route était utilisée par les deux pays à l’époque soviétique, mais comme les volumes d’échanges ont diminué après les années 1990, elle a été pratiquement mise en sommeil.

Aujourd’hui, ce corridor devient un élément central dans le futur développement des relations bilatérales.

À l’heure actuelle, les navires et les cargaisons russes empruntant le canal de Suez ne sont pas la cible principale de ces attaques. Néanmoins, la réorientation des navires du canal de Suez et de la mer Rouge vers des itinéraires plus longs contournant l’extrémité sud de l’Afrique a eu pour effet de prolonger les voyages. Elle a donc entraîné une pénurie de navires et provoqué une hausse des taux de fret.

Dans ce contexte, le corridor présente plusieurs avantages par rapport aux routes commerciales existantes entre l’Inde et la Russie (outre la route de la mer Rouge, il s’agit de la route du Cap de Bonne Espérance et de la route maritime du Nord). Le corridor permet de réduire de façon significative le temps de transit des marchandises entre l’Inde et l’Extrême-Orient russe potentiellement jusqu’à 16 jours, et la distance jusqu’à 40 %, ce qui promet des gains d’efficacité substantiels dans le transport.

Actuellement, l’itinéraire entre Mumbai (Bombay) et Saint-Pétersbourg via la route maritime de l’Ouest et le canal de Suez, s’étend sur 8 675 milles nautiques ou 16 066 km. La distance entre Chennai et Vladivostok via le nouveau corridor, elle, est nettement plus courte et ne fait que 5 647 milles nautiques, soit 10 458 km. Une économie substantielle de 5 608 km en distance qui promet des réductions significatives des coûts logistiques et une efficacité accrue du transport de fret entre les deux nations.

Le nouveau corridor n’est pas seulement une route commerciale, mais aussi un itinéraire stratégique pouvant renforcer la coopération entre l’Inde et la Russie dans le secteur de l’énergie, ainsi que dans d’autres domaines tels que l’Arctique et la route maritime du Nord.

La région arctique est une zone clé pour l’économie russe, car elle recèle environ 13 % des réserves non découvertes de pétrole et 30 % de celles de gaz. L’Inde s’est montrée très intéressée par des investissements dans des projets arctiques et par l’utilisation de cette route, un chemin plus court et moins coûteux vers l’Europe et l’Amérique du Nord que celui via le canal de Suez.

En ce qui concerne les investissements, l’Inde est activement impliquée dans la région arctique depuis des années. Par exemple, au cours des sept premiers mois de 2023, la part de l’Inde a représenté 35 % des 8 millions de tonnes de marchandises traitées par le port de Mourmansk, situé à environ 2 000 km au nord de Moscou.

L’Inde et la Russie ont déjà pris certaines mesures pour mettre en service l’itinéraire oriental. En septembre 2019, le Premier ministre indien Narendra Modi et le président russe Vladimir Poutine ont lancé le corridor maritime Chennai – Vladivostok lors de leur sommet annuel à Vladivostok.

La nouvelle route change la donne au niveau des échanges commerciaux entre l’Inde et la Russie, car elle offre une nouvelle voie viable pour la coopération énergétique et économique dans le contexte de la crise en mer Rouge. Elle peut également stimuler le partenariat stratégique et les intérêts mutuels des deux pays qui cherchent à diversifier leurs marchés et leurs sources, ainsi qu’à relever les défis posés par les sanctions et la crise. Elle peut révolutionner le commerce entre l’Inde et la Russie et ouvrir la voie à un avenir plus stable et plus prospère pour les deux pays.

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